vendredi 7 août 2009

En Ouzbékistan, l’enregistrement est employé comme une arme contre la liberté de religion ou de croyance

En Ouzbékistan, les violations les plus répandues des droits de l’homme – mises en lumière par le récent Universal Periodic Review des Nations Unies – sont l’interdiction des activités religieuses et les sanctions en cas de pratique religieuse non autorisée par l’Etat. Forum 18 a observé que c’est un sérieux problème pour les Musulmans, les chrétiens catholiques et protestants, les Témoins de Jéhovah et d’autres personnes d’autres convictions encore. Quand ces confessions sollicitent leur enregistrement, elles doivent faire face à une obstruction systématique. D’après ce que le Député général du Bureau musulman [1] a expliqué à Forum 18 à demi-mot, cette situation est motivée par la volonté du gouvernement de contrôler les communautés religieuses. Abordant le sujet des mosquées non enregistrées, il indique qu’ « on ne peut pas contrôler ce qui se passe à l’intérieur » de ces lieux de culte. Forum 18 a demandé à des agents du gouvernement pourquoi l’Ouzbékistan crée des difficultés pour les enregistrements, et pourquoi les activités religieuses non enregistrées sont sanctionnées. Le Comité d’état aux affaires religieuses [2] a refusé d’en discuter. « Je ne sais pas », a répondu un juge qui a présidé au procès de Baptistes ayant pratiqué leur culte sans autorisation. Quant au responsable des enregistrements pour la région de Tashkent, la capitale, il a répliqué que « ce sont nos affaires, et vous n’avez aucune autorité légale pour interférer avec elles ».

Certaines communautés religieuses ne vont pas bien loin dans le processus d’enregistrement. Quand les Témoins de Jéhovah de la ville de Kagan, dans les faubourgs de Bukhara, ont essayé de se faire enregistrer entre 2006 et 2008, ils ont été harcelés. La police est descendue chez eux et 10 Témoins ont été menacés de mort : ils ont aussi écopé d’une amende de 5 ans de salaire minimum chacun. Des huissiers les ont ensuite visités régulièrement dans le but de saisir leurs propriétés.

De façon similaire, la dernière demande d’enregistrement d’une communauté de Témoins de Jéhovah de la ville de Tashkent, dans le district de Sergeli, a été rejetée en février 2009. Depuis plusieurs années, des demandes sont remises annuellement, toujours sans succès.

Même si une communauté a obtenu son enregistrement, il n’y a aucune garantie qu’elle pourra conserver son nouveau statut – et ce même si elle remplit toutes les demandes officielles des autorités. La congrégation des Témoins de Jéhovah de l’est de Fergana Valley a été dissoute par le gouvernement, alors qu’elle a insisté de façon répétée pendant les mois précédant sa dissolution sur le fait que ses membres étaient complètement en règle avec la loi ouzbèke.

La seule congrégation des Témoins de Jéhovah encore officiellement agréée du pays se trouve à Chichik, près de Tashkent. Elle subit des attaques occasionnelles des autorités. Si elle en venait à perdre son statut de communauté enregistrée, c’est l’activité de tous les Témoins du pays qui tomberait sous le coup de l’interdiction.

Mme Zukhra Muzaffarova, Députée générale du Département du Ministère de la Justice de la Ville de Tashkent [3] a dit à Forum 18 : « Vous ne devriez pas faire de parallèle entre notre travail et les tribunaux. » Elle a averti l’organisation norvégienne qu’elle devait « se tenir à l’écart » des affaires intérieures d’Ouzbékistan. « Ce sont nos affaires, et vous n’avez aucune autorité légale pour interférer avec elles », a-t-elle répondu en balayant la question qui lui était posée, à savoir pourquoi son Département avait refusé d’enregistrer la communauté des Témoins de Jéhovah du district de Sergeli. « C’est à nous que les communautés religieuses devraient s’adresser au sujet de leur enregistrement, et pas à vous », a-t-elle affirmé. « Laissez-les remplir leur demande, et nous leur accorderons le statut officiel en conformité avec la loi ». Elle n’a pas souhaité poursuivre l’entretien.

[1] Deputy Head of the state-controlled Muslim Board
[2] State Religious Affairs Committe
[3] Deputy Head of Tashkent City Department of the Justice Ministry
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